when i'm alone i'd rather be with you

Elle tourne en rond comme un lion en cage. Ses yeux venant se poser pour la énième fois sur le mur rempli de post-it. Vestige de ses plus grands moments d’inspiration. Des mots par ci par là, des phrases parfois. Un truc sans queue ni tête qui ne semble avoir aucun sens. Son bordel à elle. Son truc de pseudo artiste qui lui donne bonne conscience. Qui maintient l’illusion qu’elle a peut être sa place au sein des Creeps. Mais comme toutes les choses qui la concernent, c’est bancal. Ça ne tient pas vraiment la route, ça bat de l’aile. Elle tire une taffe sur son joint. «  Fait chier » Ouais Fait chier, aujourd’hui elle ne semble capable de rien. Comme toujours dans un sens. Elle se roule dans son lit l’air presque désespéré dans un truc pseudo tragique. Dommage, personne n’est là pour assister à cette scène comique. Personne n’est là non plus, pour assister au vide cosmique qui l’envahit et qu’elle tente de combler avec ses petites pilules tant aimées. Les camarades d’une vie. Elle fait les cent pas dans sa chambre, regarde les gens passer derrière sa fenêtre. S’imagine que contrairement à elle, ils ont un tas de trucs plus ou moins intéressants à faire. Lui prend l’envie d’être comme eux. D’avoir demain quelque chose à raconter. D’avoir des mots à écrire sur les post-its vides. Elle saisit son téléphone et parcours son répertoire, ses yeux s’arrêtent sur un prénom : Anzu. C’est décidé, c’est elle qui va aujourd’hui venir combler le manque. Si elle n’est pas prête à l’appeler, elle lui envoie tout de même un sms lui proposant d’aller boire un verre à Kabukicho. Et ça, c’est déjà à des milliers d’années-lumière de son comportement habituel. Elle se surprend presque à croire que la jeune femme pourrait changer quelque chose à sa condition. Elle a pourtant envie d’y croire et de se laisser porter par cette sorte de petit espoir. Elle se met en route n’attendant même pas une réponse de la concernée. Elle a besoin de sortir et de quitter cette pièce qui l’étouffe. L’extérieur ne lui semble pourtant pas vraiment plus agréable. Elle déteste ces gens toujours trop pressés qui la renvoient sans cesse au fait qu’elle n’a contrairement à eux aucune raison de courir. Personne ne l’attend. Et si on pourrait jalousé le fait qu’elle n’a pas conséquent aucune responsabilité elle sera la première à dire que c’est surtout parce qu’elle est seule et étrangement ça sonne tout de suite moins séduisant. Elle jette finalement son dévolu sur un bar et s’installe derrière une fenêtre elle à beau envié ces gens elle ne peut s’empêcher de les regarder. Commande une bière et attend patiemment l’arrivée d’Anzu.

Des cercles de fumée s'échappent un à un d'entre ses fines lèvres. Lui aussi, il s'échappe de ses doigts fins. Qu'il parte. C'est elle qui part. C'est toujours elle qui part et disparaît dans la brume grise. C'est le brouillard dans son crâne. Elle ne voit pas. Elle ne voit pas comment construire. Elle n'a l’œil que pour détruire mais c'est toujours mieux que de se faire détruire. La brune claque la porte et s'allume une autre cigarette. Dans la rue elle s'arrête dans une épicerie, elle s'achète deux canettes de bière, les moins bonnes, les plus alcoolisées comme un reflet d'une vie à bas prix. Une canette qu'elle ouvre l'autre qu'elle cache dans son bombers. La japonaise sort et marche à contre-sens. Enfant pas sage qui bouscule les plus sages, pauvre petit cliché ambulant qui aime provoquer. Regarder de travers ceux qui regardent de haut. Elle déambule en toute sobriété, elle est dans sa bulle pseudo alcoolisée. Les personnes autour s'écartent, sourire. Elle n'aime pas ces gens, elle s'éloigne d'eux comme ils s'éloignent d'elle. Sourire encore, soupir dans le cœur. C'est peut être pas plus mal. Son téléphone sonne, elle regarde le prénom qui s'affiche et laisse sonner. Qu'il sonne, qu'il essaye, elle, elle est déjà partie loin. Elle range son téléphone. Il vibre, message. Elle hésite à le lire. Elle continue un peu sa route et au bout de sa route elle s'arrête. Elle ne va pas plus loin parce que Nao lui propose d'aller boire un verre. La c'est rare, elle ne veut ni partir ni l'éloigner d'elle, pas aujourd'hui en tout cas. La brune regarde où elle se trouve, pas loin de Kabukicho. Le hasard fait bien les choses. Il les fait bien dans sa vie en tout cas; comme un éclair de soleil qui dissipe la brume de l'esprit. Une éclaircie, Nao juste là derrière une fenêtre. Anzu cache sa canette sous son manteau et rentre dans le bar. Elle prend Nao dans ses bras, un peu de tendresse dans cette brutalité. Elle s'assoie en face pose sa bière sur la table et trinque « A rien. » avant de la finir d'une traite et perdre son regard quelques secondes sur la fenêtre. Ces gens, elle ne les aime définitivement pas. Ses yeux sont mieux posés sur Nao.